Le terme de chanson a connu les acceptions les plus diverses. Il apparaît pour la première fois au XIème siècle, dans l’appellation chanson de geste (qui est un poème épique – voir épopée).
La chanson désigne ensuite jusqu’au XIXème siècle, une forme d’expression consistant en un texte en vers mis en musique. Pendant longtemps, est chanson ce qui est noble et pur et la chanson populaire sera longtemps désignée par des expressions telles que : vaudevilles (voix de la ville), mazarinades, pont neuf… Ce n’est qu’après l’époque romantique que s’unifient sous un terme générique, la chanson et ses genres différents.

chant oiseau

La chanson qui intéresse la littérature orale est la chanson dite folklorique. Cette chanson prise en considération très tardivement fera l’objet de collectes (décret du 13 septembre 1852). Cette collecte aujourd’hui disponible pour beaucoup de régions ne semble pas témoigner de chansons antérieures au XVème siècle (hormis les chansons des troubadours transmises par les parchemins). Au XXème siècle, la disparition de  l’analphabétisme prive la chanson de son rôle social d’informateur et de mobilisateur. Dans le monde, la chanson peut avoir de nombreuses fonctions : arme permettant de ridiculiser l’adversaire chez les Inuits, support du récit chez les griots, déclaration d’amour chez les Touaregs etc.

Il y a dans la voix chantée une magie, un envoûtement que chacun d’entre nous a sans doute déjà ressenti. Mais l’expression vocale, entre la voix parlée et le chant, se décline en de multiples et subtiles nuances. La voix, comme moyen privilégié de communication, ne peut se satisfaire de cette simple polarisation. La voix chuchotée de la mère qui berce son enfant a d’autres qualités que la foule qui d’une voix criée, manifeste en chantant dans la rue. Le narrateur/chanteur, selon le contexte, le message qu’il veut faire passer, exploite les ressources musicales de la langue.

Les chansons comme les autres récits de la littérature orale nous racontent des histoires mais témoignent aussi de la présence d’une voix, qui en chantant laisse peut-être mieux transparaître les émotions humaines.

Individuelles ou collectives, les chansons ne sont pas des paroles en l’air, elles représentent bien plus qu’un aimable délassement. Si le chanteur nous conte des histoires et nous émeut, c’est peut-être qu’au travers de ces formes courtes, elliptiques, l’auditeur sent résonner en lui des échos de sa propre vie et si un chant entonné collectivement nous procure un sentiment de sécurité, c’est sans doute que la bulle sonore ainsi libérée permet à chacun d’éprouver sa commune appartenance à la collectivité.

Berceuse

Chant qui restitue « l’intime et la caresse d’une voix ». Elle recrée un univers chaleureux entre le corps de la mère et celui de l’enfant. Elle fait lien et recrée de l’un à l’autre des mouvements de va-et-vient.

Chant de travail

Assure une fonction de travail, celle d’exciter ou d’apaiser l’animal de guider dans le sillon, de l’encourager à la voix, symbiose faite entre l’homme et l’animal qui illustre une complicité qui fait l’objet d’une attention de chaque instant. Ces chants assurent aussi des fonctions de coordination (les chants de foulage ou les chants de marins, chants à hisser les voiles).

Chants de métier

Chant qui décrit le travail ou les codes, la déontologie d’un métier (chant de compagnon, chants des scieurs de long).

Hymnes

Chants religieux ou nationaux, parfois communautaires ou relatifs à un groupe de personnes reunies autour d’une activité. Ils sont révélateurs d’une identité spécifique ou de l’identité locale.

Chant de danse

Chants rythmés remplaçant les instruments quand ceux-ci sont absents.

Chants de conscrits

Chants qui rendent compte de l’attitude des jeunes villageois vis-à-vis de leur admission au service militaire et nous montrent l’adoption d’une nouvelle identité.

Chanson de table

Chanson à boire célèbrent la table ou relate les difficultés du temps ou cherchent simplement à amuser les convives.

Tentatives de classification :

De nombreux chercheurs ont proposé des classifications pour essayer d’ordonner cet immense répertoire de la chanson de tradition orale. Pour le domaine Francophone ont peut citer :  Van Gennep, Coirault, Laforte et bien d’autres que nous tenterons de vous faire découvrir dans les chapitres ci-dessous.

Arnold Van Gennep dans ses questionnaires pose les catégories suivantes :

– Chants pour endormir
– Chants pour réveil
– Chants pour l’action
– Chants pour l’instruction
– Chants pour l’éducation
– Rondes et danses
– Chants énumératifs
– Chants à consonances
– Chants d’amour
– Chants matrimoniaux
– Chants bacchiques
– Chants bouffons
– Chants légendaires
– Chants politiques
– Chants professionnels
– Chants de soldats

Pour aller plus loin

Partie 1

Partie 2

Partie 3

Partie 4

Écoutez la conférence « Le chant traditionnel, une émotion au service de la collectivité » par Marc Aubaret (2008, Alès)

La littérature orale est un ensemble de récits anonymes et semi-fixés. La plupart des chants traditionnels et certaines fables remplissent ces deux critères. À partir d’exemples tirés du corpus de la littérature orale internationale, nous tenterons de comprendre comment l’écriture et l’oralité se sont rencontrées au travers de ces genres. Nous analyserons aussi, à partir d’exemples sonores, les différentes formes de chants traditionnels ainsi que l’histoire et les raisons de leur persistance dans nos sociétés.

Isnart Cyril, 2009, " Le chant des origines. Musique et frontière dans les Alpes ", Ethnologie française, 2009, vol. 39, no 3, p. 483‑493.