L’homme dans la Lune

conte Irlandais

Pleine Lune en Irlande, vent vif, froid du printemps. Dans sa chaumière, ce vieil homme n’avait même pas de feu pour se réchauffer. « J’vais quand-même pas crever de froid chez moi » Pieds glacés dans ses sabots, l’homme sort de sa maison pour chercher du bois. Devant la maison, il prend le chemin creux qui va entre des haies, à gauche il y a le pré d’un premier voisin où paissent des vaches ; à droite le champ d’un deuxième voisin où pousse le blé d’hiver ; au bout la fontaine d’eau claire appartenant à un troisième voisin.

Or il n’y a pas beaucoup de bois en Irlande, et à cette période là les Irlandais avaient l’habitude de fermer les champs avec des buissons d’épines : ils coupaient à leur pied des arbustes épineux et, tenant le tronc, ils les portaient jusqu’à leurs champs et en fermaient l’entrée. Ainsi les bestiaux ne pouvaient pas vaguer ! Le vieil homme passe devant le pré, devant le champ de blé, devant la fontaine, mais pas de bois de chauffage abandonné. Courbé face au vent soufflant dans ses vêtements trop légers il reprend le chemin de sa maison.

« Faudrait pas non plus que je crève de froid dehors » Il prend le buisson d’épines qui protégeait l’eau pure de la fontaine, puis celui qui fermait le champ de blé, et aussi celui qui empêchait les vaches de sortir du pré. Epines ou pas, l’homme charge les buissons sur son dos, un gros fagot piquant mais il avait la peau dure « Au moins je vais enfin avoir chaud ». La maison est là, mais lorsqu’il y arrive, l’homme entend des pas derrière lui, il se retourne : une vache le suivait. Les vaches s’étaient échappées de leur pré, quelques unes étaient déjà en train de brouter les pousses de blé, une autre était dans l’eau de la fontaine et la souillait.

« Misère de misère, je vais avoir des histoires avec mes trois voisins en même temps. C’est trop pour moi » puis levant la tête vers la Lune, il invoqua « Ô Lune, toi si belle, si pure, toi qui as vu mon malheur, aides-moi » La Lune l’entendit et tira un trait entre elle et la Terre : l’homme se sentit aspiré, soulevé, déposé sur la Lune. C’est depuis ce temps-là qu’on voit à la surface de la Lune la silhouette d’un vieil homme chargé d’énormes fagots.