La programmation de l’art du conte – Séminaire 4 – Appareil critique de l’art du conteur contemporain

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La programmation de l’art du conteur contemporain : les festivals, les scènes institutionnelles, les bibliothèques …

A ce séminaire sur la thématique de la programmation de l’art du conte contemporain participent des conteurs- programmateurs qui expliquent leurs choix, leurs contraintes…

Pour engager la réflexion, un questionnement est posé :

Quel poids dans la création : du financement ? du politique ? de la programmation ?…
Quels sont les contraintes et les moyens techniques ?
Quelle promotion ? (ce que dit une affiche, un logo…)
Le(s) public(s) : quelles attentes, quelle formation ?
Les institutions : les attentes des région, des départements, des villes, en lien quels enjeux, quels objectifs ?
( Par exemple à Nice, par décision politique, plus de conteurs au festival de conte, place aux comédiens et à la lecture…)
Les structures associatives : Foyers ruraux, FOL …
Les programmateurs privés…

Traditionnellement le conte se disait dans un espace restreint pour des auditeurs de proximité. Désormais le conte se programme dans un espace géré par des institutions, pour un public. On observe environ 300 festivals francophones régulièrement organisés qui se réfèrent à la «Littérature orale») et dont la majorité existent depuis plus de 15 ans.

Dans notre société contemporaine, la culture semble de plus en plus considérée comme un lieu de « thérapie sociale », l’art émergeant qu’est le conte est récupéré dans sa fonction sociale; quelle est la place de l’artiste ?

Plusieurs participant-es sont organisateur-trices de festivals, de scènes où sont programmés des conteurs-euses. Après présentation de leur activité de programmation, de leurs choix, leurs contraintes ( objectifs, lieux, publics, calendrier ), les questions soulevées par cette pratique sont listées.

1. Les programmations présentées

*Université de Montpellier avec des étudiants spécialisation théâtre, une fois par mois
Petit lieu-théâtre à Avignon, « La maison de la parole », jauge env 26 pers, scènes ouvertes et prestations de conteurs professionnels, comme un laboratoire, depuis 2 ans, 8 dates en 2014.  (Véronique Aguilar, conteuse)

* Festival des ATP à Alès (Théâtre Populaire), 6/7 spectacles annuels programmés par une équipe d’une vingtaine d’amateurs passionnés, petites formes théâtrales parfois proche du conte, conteurs parfois programmés mais dans des formes théâtrales. (Josy Mazé, Présidente du CMLO)

* Festival Palabrages, en partenariat avec le festival Yelen au Burkina Fasso, en Vaunage, territoire de tradition taurine, entre Nîmes et Sommières, rencontres ici/ailleurs (volonté de rencontres artistiques et culturelles hors du caritatif), à l’écoute de la demande du public local, 1 semaine début juillet (soirées, stage, rencontre professionnelle thématique et grand public), public local (1800 pers), circulation de village en village, repas partagés et convivialité.
Depuis 2011, en marge du festival une journée de réflexion sur « Contes et bilinguisme » à St Gilles (partenariat Ass Caravaunage, DLL Gard, LR2L)
Ce festival assume une vocation sociale qui a mené à l’artistique (rencontres interculturelles). Vigilance sur la qualité artistique. Maillage du réseau sur toute l’année, sur le département. Soirées chez l’habitant, partenariat avec une chorale locale. (Françoise Diep, directrice du festival Palabrages)

* Festival « Contes en balade », un des quatre rendez vous culturels réguliers en dehors de l’action lecture sur le département du Gard depuis 1998, idée de porter vers le public une sensibilisation et un accès aux contes, thématiques choisies selon les besoins observé (ex. en 2013, différences culturelles, qu’est ce que le conte nous apporte ?) Structure de base: deux fois deux conteurs dans trois endroits différents ; depuis 2007, mise en place d’une journée professionnelle en partenariat avec le CMLO et des intervenants professionnels, à destination des bibliothécaires, un temps pratique et de réflexion.
Propositions programmées pour des publics spécifiques (maison d’arrêt, personnes âgées, foyer départemental de l’enfance)
Forum animation (janvier) pour découvrir les artistes de proximité dont les conteurs
Après midi contes au Pont du Gard : tout public et familles du service Enfance et famille.  (Roselyne Dumazel, chargée culturelle de la programmation de la
Direction Livre et Lecture du Gard et du centre de ressources)

* Paroles en Festival, en Rhône-Ardèche, plusieurs lieux (ex. un petit lieu, le lavoir public), contes et nouvelles, raconter et lire à haute voix, un parti pris : raconter, raconter, raconter… pour que le public s’approprie les histoires.
– Interventions scolaires sur l’année auprès du jeune public, restitution scène au moment du festival
Agnès Chavanon, conteuse, chargée de la programmation du festival

* « Les z’enfants d’abord », festival scolaire sur la communauté de communes Piémont cévenol, scéances tout public, séances scolaires. (Gille Crépin, conteur)

* « Contes sous le tilleul », depuis 2010, à domicile, programmation choisie par coup de coeur, tout public et une vingtaine de passionnés (env. 200 pers) (Catherine Caillaud, conteuse, enseignante, programmatrice « amateur »)

Chaque expérience présentée est suivie des interrogations que l’expérience soulève . Elles ont été regroupées par thématique.

2. L’enjeu de la programmation pour le programmateur ?

* Les intentions
La raison d’une programmation est-elle de défendre les artistes ?
Le choix du programmateur: qu’est ce que je présente pour quoi faire ?
Quelle lisibilité d’un festival ? activité artistique, territoriale, sociale, politique ?
Quelle est l’intention ? politique ? Culturelle ?
Intention politique au détriment de l’artistique ? si pas de précaution comment protéger l’art du conte ? L’art du conte au service du social ?
Liée à une réalité économique : faire venir le public, obtenir des subventions…

* Les choix
Choix des intervenants : plusieurs pistes (selon thématique, connus et/ou découverts par l’équipe)
Choix des lieux : en fonction de la disponibilité, de la volonté de partenariat des structures
Avantages d’une programmation départementale : aller à la rencontre du public dans des « petits » lieux,
grande diffusion de l’information (malgré les contraintes de la communication)

* La promotion
Au delà de la programmation comment promouvoir cet art du conte en bénéficiant de cette large diffusion ?Avons nous les outils pour le faire ? Former les médiateurs (bibliothèques) mais pas facile en peu de temps
Face aux collectivités : comment communiquer, dire aux personnes « hors réseau » du conte, ce qu’il est ?
Pour le conte traditionnel cela semble simple (matière, répertoire…), dans l’expression contemporaine, ça reste confus

3. Le programmateur et le conteur

* Le programmateur : une responsabilité, des exigences, force de proposition
Le programmateur prend le risque; qu’est-ce qu’on programme (un « produit fini » ou un conteur qui peut « se planter ») ?
Le programmateur a la charge du lieu d’accueil (conditions, technique…)
Accueil des conteurs : prise en charge des frais, de la technique, de la communication
Nécessité pour le programmateur d’accueillir l’artiste, de l’accompagner pour le comprendre (individu et démarche).
C’est formateur de se retrouver programmateur. Découverte de « l’envers du décor » de la programmation (politique, festivals) le regard critique s’affine
Apprentissage du travail de programmateur enrichissant et complexe (séances tout public, séances scolaires, difficile parfois d’accueillir les artistes, relation publique pendant les séances

* Le conteur
Les conteurs ont besoin de se produire
Comment le conteur fait valoir son travail, fait connaître son répertoire ? expérience des lettres d’intention plutôt qu’une plaquette quadri ou 8mn sur vidéo/internet (le pire ou le meilleur).
Après avoir conté pour les enfants, difficulté de présenter la façon de travailler auprès des programmateurs
Le conteur : une personne sereine qui cherche pas à plaire et quand ça fonctionne, ça dépasse les autres arts.
Répondre à une commande quand elle ne correspond pas à ce que l’on a à dire, pas facile
Demande d’animation : possible de s’adapter, travailler comme dans un laboratoire
L’artiste ne travaille pas son axe sur commande
Risque de confusion, pour le public, entre l’artiste et l’artiste-animateur

* Relation aux institutions
Le conte manque de lisibilité auprès des institutions qui ont aussi besoin d’avoir un retour sur la demande du public.
Face aux collectivités : comment communiquer, dire aux personnes «hors réseau» du conte, ce qu’il est ?Pour le conte traditionnel cela semble simple (matière, répertoire…), dans l’expression contemporaine, ça reste confus
Côté institution, le conte est considéré comme une forme théâtrale et pas de de budget débloqué pour le conte.
Pas de politique culturelle sur la communauté de communes et difficile de défendre un projet communautaire

4. Public et représentation du conte

* Représentation du conte
Quelle est l’attente du public ? ses besoins ?
Il y a des habitudes (conte=enfant) et pas d’outils pour déterminer qui est le conteur, quel est son travail.
Communication, difficile de dépasser le stéréotype « enfance » lié au conte
Nous faisons bien la différence avec des spectacles de contes; ceci est très intéressant à analyser, quels sont les critères des différences théâtre/conte?
Difficile de programmer le traditionnel (la transmission) : l’Afrique est dans un « créneau », le public reconnaît-il la parole conteuse à cet endroit ?
Le festival « Palabrages » assume une vocation social, d’un ancrage de proximité qui a mené à l’artistique (rencontres interculturelles) en gardant une vigilance sur la qualité artistique.

* Le public ou les publics
Difficile de cerner les publics, les tranches d’âges des personnes intéressées…
Question sur la fréquentation des 25/40 ans ?
Des exemples (marche des conteurs, contes à la coloc, ciné-goûter-conté…) montrent qu’un autre public est intéressé, peut être touché, retrouve des émotions…
Public du festival : tout public à partir de 7/8 ans, dans les petites communes, public peu nombreux (en baisse ces dernières années)
Difficile de sensibiliser les publics (personnel en bibliothèque) sur une programmation spécifique (ex l’épopée)
Exemple de la programmation du CMLO qui accueille des conteurs qui reviennent régulièrement ; on constate que le public est toujours là, voir plus nombreux. Aller vers le public : une position de notre part sur la globalité.
La lisibilité du public, critère de l’appareil critique ?
Le public manque d’infos sur les programmations contes ; informée une fois entrée dans le réseau d’Aural.
Le conteur doit faire fort pour m’intéresser un peu, certains m’embarquent très vite, d’autres non. Ça tient à quoi ?
Important de considérer les auditeurs
Allez chercher le conte là où il est, ne pas s’enfermer dans la matière que l’on conte
Un travail de pédagogie et de vocabulaire est nécessaire pour aller vers le non-public.
Le conte fonctionne par « contamination » ce qui peut limiter au cercle restreint du public amateur…
Maurice Tardieu avait vendu des contes sur le marché, dit des contes dans un totem à tuyaux…l’artiste peut porter le conte vers un public qui le découvre « par hasard »

5. Communication, réseaux

* Communiquer : Pour quoi ? Comment ?
La communication : comment favoriser le sens du conte et ouvrir à cette relation, aux autres arts ? le conte, à l’origine des autres arts ?
Promotion et choix de l’image : besoin d’expliquer notre démarche face aux « stéréotypes » des illustrateurs (réf aux livres)
Contrainte des délais qui oriente parfois le choix des visuels
Obligation de préparer le terrain, de préciser le sens et l’univers du conte pour ensuite communiquer dessus.
Sur quel critère communiquer ?
– sur l’état dans lequel nous met le conte… ?
– sur la littérature orale en tant que patrimoine… ?
– récits à réécouter (contrairement à notre société de consommation) ?
A communication standard, message standard ?
Quelle communication spécifique ? question du graphisme qui peut desservir parfois…

* Les réseaux
Avantage/inconvénient du réseau : comment toucher le public hors réseaux ?
Diffusion info : réseaux des théâtres, flyers dans les lieux spécifiques à Avignon
Comment faire sortir l’info du réseau ?
Maillage du réseau toute l’année, sur le département  pour élargir l’audience : des soirées chez l’habitant (qui s’essaie au conte…), création de curiosité chez les conteurs et le public…, un partenariat avec une chorale locale
Diffusion : vers bibliothèques, écoles, collèges, lycées et collectivités d’accueil
Faute de réseau (théâtre) et de diffusion, le spectacle n’est toujours pas monté

* Sur quoi communiquer ?
Conte facile d’accès dans un premier temps, ça se complique ensuite ?
Pascal a longtemps conté sans dire à l’avance ce qu’il allait conter (position du conteur traditionnel) ; difficile de travailler dans l’impro avec un musicien.
Des exemples : Petit festival à Sarrat : le nom des conteurs, pas de titres annoncés ; Contes de …, sans dire le nom des conteurs ; Marche des conteurs : pas de nom, pas de titre, ça se passe en fonction du lieu, rencontre avec le conte, les gens…
La sincérité du conteur : élément de communication à exprimer différemment
Osez ! la communication grand format pour diffuser le conte ! (panneaux Decaux à Lyon : Rencontres de conteurs en Rhône Alpes)
Comment communiquer pour expliquer à chacun, à « tout le monde » ?

6. L’art du conte

* Un art populaire en soi ?
Qu’est ce que le conte apporte que les autres arts n’apportent pas ?
Dans la tradition le conte est proche du social (populaire), est-ce là la vocation de cet art? est ce à défendre ?
Un certain travail « élitiste » actuel ferait-il perdre cette vocation populaire ?
Quelle est la vocation de cet art ? dans le champs politique, social n’a t il pas là toute sa place ?
Découverte du conte via d’autres arts (cinéma, peinture…)
Allez chercher le conte là où il est, ne pas s’enfermer dans la matière que l’on conte

* L’art du conte : un art à défendre ?
Notions à défendre en communication ?
Comment les journalistes le défendent en dehors des banalités ou stéréotypes du conte ?
Dans notre réflexion sur l’appareil critique, comment défendre la spécificité de cet art qui peut montrer que ce travail artistique n’est pas « n’importe quoi » parce qu’il assume sa fonction sociale et politique.
Conteur/narrateur ? le conteur est témoin sincère, par rapport à lui, de ce qui se passe dans le conte. Le comédien joue le personnage.
On remarque que dans l’art il y a beaucoup d’œuvre sur commande. Artistes confirmés ? quelle commande ? Résidence ? Quelle forme ?
C’est quoi un laboratoire ? une « résidence » avec une intention. Il permet de mettre en place une grille de lecture pour suivre l’axe de travail et d’énoncer la démarche artistique.
Quelle est la recherche du laboratoire, quelle direction ?

* Le conteur et son art
Différence avec le théâtre, le conteur est dans le cercle, le récit est au centre (espace sacré dans la tradition) ; le conteur veut disparaître, le comédien veut apparaître dans le personnage.
« Faire advenir le beau » dit Michel Hindenoch : pour cela la salle doit être bonne, le public et le conteur aussi.
Le conteur traditionnel n’a pas la nécessité du beau, mais de l’efficace; pas de comparaison possible avec la prestation artistique.
Important dans notre réflexion « l’art de l’impro » ; François Debas (conteur stagiaire au cmlo) a travaillé sur les nouvelles veillées où la convivialité prime sur le répertoire
Je crois dans la transmission portée par le conte même si on ne la rencontre pas partout.

Notes :
Agnès Chavanon : donne des informations sur le réseau RNCAP – Réseau National du Conte et des Arts de la Parole.
Ouverts aux Programmateurs, conteurs-programmateurs
Réflexions
Site internet
RIC : base de données annuaire, agenda, (mise en place par Agence culturelle-Nacre)
Chacun dans sa région recense les personnes et structure qui s’intéressent au conte
Travail qui a pour but de faire connaître l’importance du réseau
Soutien du Ministère de la culture

CNAC : Coordination Nationale des Acteurs du Conte, (un an et demi), (rencontre APAC et RNCAP)
Travail en cours sur un manifeste

A consulter :

« Le chevalier des mots », Entretien avec Bruno de La Salle de Nicolas Roméas in Revue Cassandre n°57, (2004)
« Education et tradition  », entretien avec Amadou Hampaté Ba à propos sur la tradition orale africaine (à voir sur youtube, film ancien)

La 2ème partie de la journée est consacrer à « un petit exercice » d’analyse de vidéos de conteurs. A partir de la grille de lecture évoquée en janvier, il est proposé de tenter de repérer un style.

Exercice d’application sur les enregistrements de :
Michel Hindenoch, Catherine Zarcate, Pepito Matéo, Yannick Jaulin, Fred Pellerin, Alain le Goff

Où sont les points communs, les divergences ? Quel courant ? Territoire, accroche public …

Présents : Véronique Aguilar, Agnès Chavanon, Roselyne Dumazel, Edith Zelmati, Anne Dambrin, Catherine Caillaud, Gille Crépin, Françoise Diep, Anne Gomez, Anne Wang, Catherine Maure, Josiane Mazé, Evelyne David, Marc Aubaret.

Pour aller plus loin

Détails

Date :
18 février 2014
Catégories d’Évènement:
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Évènement Tags:
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Lieu

Locaux du CMLO, 15 quai Boissier de Sauvages -30100 Alès
15, quai Boissier de Sauvages
ALES, Gard 30100 France
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